Accueil Economie Agroalimentaire A la découverte de Sodabi, le Whisky togolais vieux de plusieurs siècles

A la découverte de Sodabi, le Whisky togolais vieux de plusieurs siècles

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Le Sodabi, ce spiritueux traditionnel très réputé dans la sous-région ouest-africaine, n’a pour autant pas une réputation saine. Au Togo, sa fabrication reste discrète et un secret gardé par un nombre restreint d’artisans.

Il n’est de boisson qui ait gardé une grande popularité dans la sous-région ouest-africaine que cette eau-de-vie ancestrale obtenue à partir de la distillation du vin de palme. Il prend des noms différents. Au Togo et au Bénin, il est connu sous le nom de Sodabi. Au Ghana, il est plutôt appelé Akpétéshie comme les Nigérians le connaissent sous l’appellation d’Agoro.

Réputé pour son mérite apéritif, au Togo comme partout ailleurs, le Sodabi a d’autres vertus, surtout quand il est mélangé avec d’autres ingrédients étrangers ou adjuvants tels des racines, écorces de plantes ou des herbes servant aussi d’arôme. Le Kasabréko ghanéen, a après analyse faite dans les laboratoires au Togo, suite à la saisie d’un stock par la police togolaise, révélée les vertus en virilité des quatre plants sur sept utilisés pour faire cette boisson. Même si la consommation de cette liqueur locale moins chère a franchi le cap de la différence de classe sociale, ou même s’il revêt un caractère socioéconomique non négligeable dans les sociétés traditionnelles, les distilleries sont souvent installées dans les brousses et la fabrication du Sodabi garde son caractère secret. Un fait lié à l’histoire selon l’enseignant-chercheur à l’Ecole Supérieure de Techniques Biologiques et Alimentaires, ingénieur en Industrie agro-alimentaires M. Elolo Osséi.

En effet, la fabrique du Sodabi avait été interdite depuis les temps coloniaux, taxés d’avoir des inconvénients sur la santé dans le dessein de faire passer les liqueurs d’origines européennes. Une interdiction qui est restée en vigueur jusqu’au temps de l’ancien président Gnassingbé Eyadema.

En 1989, M. Osséi a dirigé un mémoire d’un étudiant (DJATO Kanfoutiny) sur le Sodabi à l’issue duquel l’étudiant est arrivé à la conclusion selon laquelle le Sodabi n’a pas un impact négatif important sur la santé ; même si l’enseignant affirme que les machines utilisées moins sophistiquées n’avaient pas permis d’identifier le méthanol dans la liqueur. Actuellement, une thèse en cours dont les travaux de recherches ont été faits en Belgique dirigée par le même enseignant révèle la présence du méthanol (une substance qui a une conséquence sur la santé) dans le Sodabi, mais à une dose insignifiante.

Si le procédé de fabrication de la boisson était, jusque-là, resté identique à celui des origines, d’autres procédés, moins « alambiqués » sont utilisés aujourd’hui pour obtenir ce nectar local.

A consommer comme un Whisky

Le discrédit jeté sur la liqueur, fondé parfois sur des observations très souvent erronées, est plus que devenu normal, même si rares sont les travaux basés sur cette eau-de-vie. Considérée comme ayant un impact direct et à coup sûr sur la santé, les recherches du doctorant Tagba démontrent (à quelque exception près) le contraire. En réalité, le suivi de sa production auprès d’une vingtaine de producteurs a permis d’identifier de différentes méthodes de production. Les résultats ont permis d’identifier les différentes composantes de cette boisson. La plupart des molécules mises évidence ne sont pas différentes dans d’autres spiritueux commercialisés comme le très consommé Whisky.

Selon le maître de mémoire, aucun composé toxique majeur n’a été retrouvé hormis des traces insignifiantes de méthanol, des quantités qui ne constituent aucun risque de toxicité sérieux sur l’organisme. Selon l’enseignant, même le Sodabi fait avec des éléments comme les métaux qui ne servent qu’à dynamiser la fermentation de l’alcool, est en réalité sans effet nocif « puisqu’avec cette méthode de préparation, c’est la vapeur obtenue à partir des chauffages qui constituent le produit fini alors que les microbes ou la rouille ne peuvent pas se transformer en vapeur. La vapeur, c’est l’eau et l’alcool ». Dans ce cas de figure, si problème il devrait avoir, c’est la qualité potable de l’eau utilisée à la fin.

En réalité, au Togo le Sodabi est présent lors de toutes les cérémonies importantes. Servant parfois de liaison entre le monde invisible et visible à en croire les producteurs et consommateurs, il devient quasi impossible de prohiber son breuvage. Mais puisque l’abus de tout alcool fut-il d’Europe, est nuisible, l’abus du Sodabi peut faire agir le méthanol sur la santé avec pour premier risque, la cécité.

S’il est vrai que la présence des bars ou bistros dans un pays fait montre des soucis de la population, au Togo se sont les rideaux blancs qui foisonnent.

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