Economie Tanzanie Tanzanie, pas de révolution numérique sans les femmes [Grand Angle] Posté il y a 6 mars 2018 9 min de lecture Partager sur Facebook Partager sur Twitter Partager sur Google+ Partager sur Linkedin En Tanzanie, afin de combler le fossé de genre creusé dans le domaine de la technologie, certains centres misent sur la programmation et le codage pour les jeunes filles. Si depuis plus d’une décennie, la Tanzanie a maintenu une croissance économique relativement élevée de 6 à 7% par an, selon la Banque mondiale, une forte croissance démographique et une urbanisation croissante ont laissé 12 millions de Tanzaniens dans une pauvreté extrême, alors même que 800 000 jeunes entrent chaque année sur le marché du travail. Les disparités entre les sexes persistent également, les femmes représentant la proportion la plus élevée de personnes n’ayant jamais fréquenté une école, selon le Bureau national des statistiques de la Tanzanie. Par ailleurs, même si le nombre de femmes et d’hommes qui suivent des cours de science et de technologie en Tanzanie est presque égal, le taux de chômage des femmes sur le terrain est plus de deux fois supérieure à celui des hommes, selon une étude récente du gouvernement. Une réalité qui casse la tendance mondiale en réalité. Pourtant, le buzz sur les programmes de codage en Tanzanie dément certains des problèmes d’infrastructure et de travail auxquels la population féminine est confrontée. Alors que, selon certains observateurs, pour un pays comme la Tanzanie qui possède une industrie technologique prometteuse, la résolution de ce problème pourrait être vitale pour son avenir. Le codage pour combler le fossé Hyasinta Luhanga, 18 ans, vie à Dar es-Salaam. Chaque matin, avec une douzaine de camarades, elle apprend à coder au sein de l’entreprise sociale Apps & Girls, un centre qui vise à former de futures programmatrices et, ce faisant, à combler le fossé entre les sexes dans l’industrie technologique nationale. La jeune fille a d’abord rejoint les classes de codage à travers une activité de club. Avec un vif intérêt pour les mathématiques et les sciences, et surtout une envie de se lancer dans l’entrepreneuriat, elle a pensé que la programmation était une excellente façon de poursuivre une carrière dans le secteur de la technologie. Les cours de codage, pense-t-elle, lui ont donné l’occasion de changer et de remettre en question tous les aspects de sa vie. « Beaucoup de filles de mon âge se désolaient de vivre comme si Internet n’existait pas. Enseigner aux jeunes filles à coder, ajoute-t-elle, peut les aider à remettre en question les rôles sexuels traditionnels et à obliger certains parents à réévaluer si le mariage est la meilleure option pour les filles. » Depuis son lancement en 2013, A & G a enseigné à plus de 1 900 filles la programmation web et comment construire des applications pour smartphones. Puisque l’organisation agit également comme un incubateur, les participants sont encadrés sur la façon de créer un plan d’affaires et comment présenter à des partenaires potentiels. Ils sont également connectés à d’éventuelles opportunités de financement et d’emploi. Le centre reste ambitieux dans sa mission, même si l’écosystème technologique de la Tanzanie n’est pas aussi avancé qu’au Kenya, au Nigeria ou en Afrique du Sud. Carolyne Ekyarisiima, fondatrice d’Apps & Girls, estime que ces disparités pourraient jouer un rôle de catalyseur. Les grandes villes comme Dar, Mwanza ou Dodoma ont beaucoup de besoins, et les innovateurs pourraient aider à créer des solutions accessibles dans des secteurs aussi divers que l’approvisionnement en eau et en énergie, la santé et la gestion des déchets, explique Ekyarisiima. Pour les jeunes filles, apprendre à coder tôt peut aussi aider à développer des capacités de réflexion critique et de résolution de problèmes, ainsi que la confiance, croit-elle. Le codage pour toutes Pour aider à stimuler le secteur technologique dans son ensemble, la Commission tanzanienne pour la science et la technologie (COSTECH) a étudié comment inciter à l’invention et à l’innovation pour les passionnés et les financiers. En plus de son rôle de conseiller, la commission accueille également le Buni Hub dans ses bureaux. L’espace a aidé à lancer certaines des plus grandes startups du pays, y compris le service de distribution de livres électroniques HadithiApp et le système de gestion scolaire ScholarDream. De fait, les initiées au sein de Apps & Girls ont pu contourner certains de ces défis en concevant des plateformes qui permettent aux étudiants d’ emprunter et d’acheter des livres à des prix abordables, de signaler le harcèlement sexuel dans les transports publics et de recevoir une éducation sanitaire et sociale en autres. Avant de s’étendre, les jeunes apprenantes veulent également normaliser leur programme de codage et le traduire de l’anglais vers le swahili. Actuellement, A & G travaille avec le Centre pour l’innovation sociale et l’entreprise de l’Université du New Hampshire afin d’améliorer leur stratégie commerciale et d’obtenir plus de sources de financement. D’ici là, le centre veut rester déterminé sur son objectif.