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Yacouba Sawadogo, le « monsieur écolo » burkinabé

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L’homme a une silhouette et des rides qui renseignent aisément sur sa génération. Il a 80 ans. Pourtant il a une réputation qui tend vers le miraculeux : le stoppeur du désert.

À 184 km de Ouagadougou, une forêt du nom de « Gouga » d’une vingtaine d’hectares s’est faite célèbre par sa végétation dans une zone frappée d’aridité.

Plus tôt, depuis les années 1970, le Nord du Burkina Faso s’était confronté à une désertisation sans précédente. Dans cette région, les longues sécheresses des années 1970 ont provoqué un désastre écologique sans précédent. Brousse ravagée, animaux décimés, pluies raréfiées. Les résultats étaient inquiétants et selon l’Observatoire national de l’environnement et du développement durable (ONEDD), en juin 2011, la région est l’une des trois zones du pays où la dégradation des sols était la plus forte, avec un indice de 3,1 sur 5, et le rythme de dégradation des terres y est élevé… Avant qu’un certain Yacouba Sawadogo ne s’invite dans la zone.

Un messie burkinabé

« À la fin des années 1960, des prédicateurs ont annoncé que nous ferions face à une sécheresse sans pareille dans notre localité. Face à ce malheur annoncé, j’ai décidé de laisser tomber mon commerce de pièces détachées afin de me mettre à l’agriculture. Afin de comprendre comment la nature se régénère, j’ai mis deux ans à sillonner les terres de mon village, souvent à pied, parfois à cheval » dit-il.

Le contraste entre sa première vie de commerçant de pièces détachées et cette dernière de héros salvateur d’un territoire hostile à toute vie végétale fait de lui un héros. Yacouba n’est diplômé d’aucune grande école. Il est illettré. « Dès le début, j’étais convaincu que les terrains désertiques deviendraient un jour une forêt. Mais les villageois me traitaient de fou ! », se souvient-il.

Le cultivateur a utilisé une technique naturelle : la régénération naturelle assistée (RNA). Cette pratique d’agroforesterie vise à protéger les plantules qui poussent naturellement sur un champ, en y appliquant divers paquets technologiques de conservation des eaux et des sols.

Le Zaï

Le Zaï consiste à creuser de petits trous de quelques centimètres, dans lesquels on met de la fumure organique avant les semis. Ces petits carrés permettent aussi de retenir l’eau, mais aussi à construire des cordons pierreux, un sytème qui nécessite d’attacher des cailloux à l’aide d’un grillage afin d’empêcher le ruissellement de l’eau. Cette technique permet de ralentir l’érosion des sols et de garder l’humidité pendant les périodes de sécheresse : : voilà comment Yacouba y est arrivé.

Après une quarantaine d’années de travail de récupération et d’ensemencement de graines d’arbre et d’herbe, Yacouba Sawadogo a créé une véritable forêt au milieu d’une brousse éparse. « C’est un travail passionnant », explique le cultivateur. Si aujourd’hui, il déclare modestement ne pas être l’inventeur de la RNA, il a fortement contribué à sa mise en valeur.

Yacouba Sawadogo travaille ainsi tout au long de l’année, en saison pluvieuse comme en saison sèche. La forêt créée par « l’homme qui arrête le désert » constitue, par ailleurs, un véritable patrimoine écologique, utile sur le plan de la médecine traditionnelle. Elle permet aussi de pratiquer l’agriculture… tout en gardant les arbres.

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