Accueil Afrique central Canal+, Vivendi […] Bolloré à la conquête de l’Afrique 2.0  

Canal+, Vivendi […] Bolloré à la conquête de l’Afrique 2.0  

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Bolloré, le groupe français dirigé par Vincent Bolloré entend poursuivre sa conquête du continent africain. Le groupe veut créer au moins 50 salles de spectacles sur le continent, déployer la fibre optique et poursuivre son implantation dans le vaste marché de la TNT. Grâce à ses diverses activités en Afrique, le groupe français affiche un chiffre d’affaires en hausse de 5 % au troisième trimestre 2017.

A périmètre et taux de change constants, le chiffre d’affaires du groupe Bolloré (transport, logistique, médias, stockage d’électricité) progresse de 4,9 %, selon un communiqué diffusé jeudi soir. Cette évolution, le Groupe français la justifie par les résultats satisfaisants enregistrés dans divers domaines d’activités dans lesquels il intervient. Il s’agit principalement de la croissance de 10 % de l’activité transport et logistique qui bénéficie de la hausse des taux de fret et des volumes, et des bonnes performances des terminaux portuaires notamment en Afrique. A cela s’ajoute la progression de 10 % de l’activité logistique pétrolière consécutive à l’augmentation des prix des produits pétroliers, ainsi que la progression des activités communication (+2 %) et la hausse du stockage d’électricité et solutions (+2 %)

En Afrique où le groupe français n’est plus à présenter, Bolloré affiche une santé de fer. Son PDG, Vincent Bolloré veut surfer sur la vague numérique qui inonde le continent africain. Depuis plusieurs mois, Vivendi et Canal+ multiplient les projets à destination d’une classe moyenne grandissante et de plus en plus connectée en Afrique, où la révolution numérique est constamment prometteuse. Cette forme du groupe français semble imputable à l’intégration de Vivendi dans ses comptes, et la stabilisation de l’activité de Canal+, qui était en recul l’an dernier.

Dans cette « réforme » du groupe qui vise à conquérir le territoire africain de plus en plus démographiquement grand, la télévision payante. Depuis 2016, la chaîne cryptée propose des offres disponibles sur la télévision numérique terrestre (TNT) dans certains pays comme la République démocratique du Congo (Kinshasa et Lubumbashi) et au Congo Brazzaville (Pointe-Noire). Et en 2017, Canal+ vise la Côte d’Ivoire. « La TNT nous permet d’aller chercher des clients moins fortunés avec des tarifs d’abonnement de 4.000 francs CFA (environ 6 euros) pour 30 chaînes, précise David Mignot, le Directeur général de Canal+ Afrique. C’est une technologie de transition en attendant l’essor de l’ADSL, la fibre optique, la 4G et la 5G ». Et Canal+ compte bien accélérer cette transition.

3 millions d’abonnés

Autre projet impulsé depuis la reprise en main de Vincent Bolloré : la construction de 50 à 100 salles de cinéma et de spectacles en Afrique subsaharienne dans les prochaines années. La première a ouvert ses portes en juin 2016 à Yaoundé (Cameroun), s’en est suivies d’autres dans certaines capitales comme la salle de Lomé inaugurée octobre 2017. Accra (Ghana) et surtout Lagos (Nigeria), la plus grande ville du continent avec ses 22 millions d’habitants, sont dans la mire. Ce projet baptisé Canal Olympia est dédié à la projection de films, mais aussi à l’organisation de concerts d’artistes africains et étrangers, ainsi qu’à l’accueil de stand-up d’humoristes. « Chaque salle doit permettre de détecter des talents locaux, de les faire connaître et valoriser ainsi la culture africaine » selon David Mignot.

Canal+, qui a aussi lancé en octobre 2014 la chaîne de divertissement 100 % africaine, A+, a fait depuis 2011 du continent un axe majeur de son développement à l’international. La branche du groupe en charge de l’Afrique est ainsi passée en six ans de 300 à environ 1.500 salariés. En 2011, le média avait 400.000 abonnés en Afrique, précise David Mignot. Aujourd’hui il ne compte pas moins de 2,5 millions d’abonnés actifs.

Un succès qui s’explique notamment par la multiplication des offres proposées par Canal+. La chaîne a par exemple signé des accords de diffusion avec Walt Disney et la Fédération ivoirienne de football. Depuis, Canal+ dispose presque saine en Afrique. Des émissions dédiées au continent, à l’instar de The Voice, l’Afrique a un incroyable talent font les choux gras du groupe de médias.

En position d’attaque

Lorsque Vincent Bolloré reprend en main la chaîne en 2015, il demande à ses équipes de favoriser les synergies entre Vivendi et Canal+. L’un de ces rapprochements vise à construire un réseau de fibres optiques en Afrique subsaharienne. L’idée est de déployer la fibre en aérien, le long des poteaux électriques.

Une technique jugée moins coûteuse que le creusement de tranchées pour enfouir la fibre dans le sol. L’industriel breton s’appuie notamment sur le succès de GVT, l’ex-filiale de Vivendi revendue à prix d’or au groupe espagnol Telefonica (7,5 milliards d’euros) en 2015 et connu pour avoir bâti un réseau haut débit de qualité au Brésil.

L’empire Bolloré en Afrique

Vincent Bolloré a développé son empire comme personne d’autre. Françafrique, influence politique, propagande, censure, tout y passe. En Afrique et en France, l’influence du milliardaire est connue. Bolloré Africa Logistics est incontournable sur le continent. Il est présent dans une quarantaine de pays africains.

Il contrôle la manutention, seul ou en partenariat avec d’autres sociétés, de 14 ports en Afrique ainsi que 23 ports secs. Parfois, Bolloré Africa Logistics contrôle également le réseau ferroviaire et routier. Dans certaines régions d’Afrique, on peut même parler d’omniprésence de Bolloré qui jouit par exemple d’un quasi-monopole sur les ports du golfe de Guinée.

En 2016, les policiers de l’Office central de lutte contre la corruption avaient soupçonné le groupe Bolloré d’avoir utilisé Havas, son bras publicitaire, pour obtenir des concessions. Deux ports avaient été pointés du doigt : Conakry et Lomé. En Guinée, Havas s’est occupée en 2010 de la campagne électorale d’Alpha Condé. En 2011, le président fraîchement élu débarquait Getma, la compagnie qui gérait le port depuis 2008 pour confier la concession à Bolloré.

Même scénario au Togo. En 2010, le groupe Bolloré obtient la concession du terminal à conteneurs du port de Lomé pour 35 ans. La même année, Faure Gnassingbé, conseillé par Havas, était réélu.

Bolloré est présent en Afrique dans les activités logistiques depuis les années 1980. Mais c’est dans les années 1990, quand la Banque mondiale et le FMI incitent les pays africains à privatiser les concessions portuaires, qu’il se taille la part du lion.

Entre-temps, le groupe Bolloré a diversifié ses activités sur le continent. Outre le rail, Bolloré assure aussi la logistique pour des groupes pétroliers comme Total en Angola. Le groupe possède également des plantations d’hévéa et de palmiers à huile, à travers sa filiale Socfin présente au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Libéria ou encore en RDC.

Le secret de la réussite du groupe, selon Olivier de Noray, directeur des ports et terminaux chez Bolloré Africa Logistics : une stratégie entièrement centrée sur l’Afrique.

 

 

 

 

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